2019

La chose mérite d'être signalée: mon récent voyage avec Air Austral s'est passé comme prévu, y compris les horaires, aussi bien à l'aller qu'au retour. Grâce à ma carte Capricorne, j'avais un bon pour 8 kg supplémentaires, ce qui m'a permis de porter beaucoup de vêtements. Ce bon n'est valable que pour un des trajets, dans mon cas l'aller, puisque, au retour, je mets ma petite valise dans la grande : je ne rapporte que quelques cadeaux. Le visa touristique de 30 jours est toujours à 35 euros. A noter que le tarif pour 60 jours n'est qu'à 40 euros. C'est encore une fois Gérard qui est venu m'accueillir à l'aéroport de Tamatave. La RN5 est plus mauvaise que jamais : on ne peut s'imaginer ici son état, mais les 90 km nécessitent 3h de route, du moins en taxi-brousse. Cela doit expliquer, en partie du moins, qu'il n'y ait que bien peu de touristes sur la côte Est.

A cette période de l'année, il fait très vite nuit, dès avant 18h, et les Malgaches... ont froid ! C'est "l'hiver austral", dont je ne me plains pas, car je peux abandonner, après deux jours (il me faut ce délai pour m'habituer à la température d'ici), l'essuie qui me sert à m'éponger régulièrement le visage envahi de sueur. Evidemment, dans ces conditions, on est vite au lit ! Le petit déjeuner est pour moi le meilleur repas de la journée, avec du bon pain que Gérard m'a acheté à Tamatave, du beurre du Score, et... ce que j'ai amené de Belgique (charcuterie, fromage, confiture). Pour ce qui est du midi et du soir, je profite abondamment des poissons frais: camarons parfois, crevettes, sabres (grands poissons en forme de ceinture) et petits poissons comme des sardines, achetés au marché le plus souvent. C'est souvent trop pour moi seul : Vavrina et Arliny en profitent volontiers !

Il faut, à chaque début de séjour, que je fasse mettre le scooter en ordre. J'y suis résigné, quoique... Cette fois encore, c'est le carburateur qui est bouché. Facile de trouver un réparateur bon marché, quand il n'y a que de la main d'oeuvre en jeu. Pour les pièces de rechange, une bougie par exemple, ce sont les prix de chez nous. L'essence, en bouteilles en plastique au dépôt local est à 4.600 ar. le litre (1,15 €), au lieu de 4.200 aux stations service de Fénérive.

Le début de mon séjour sera plutôt pluvieux, et je me suis plus d'une fois découragé de partir à la plage; pourtant, ici le ciel se dégage aussi vite qu'il ne se couvre, laissant quand même les pistes encombrées de grosses flaques, parfois impossibles à contourner. Evidemment, l'alternance chaleur / humidité convient bien aux champignons et c'est dans la pelouse de Vero, qui donne sur la plage, que j'en observe le plus: des amanites, des hygrophores visqueux, des gastéromycètes, de petits Crinipellis et des panéoles, etc. J'ai pu de nouveau photographier - ils ne sont pas rares ici - de magnifiques Phallus (= Dictyophoraindusiatus, apportés par Marguerite, à voilette jaune spectaculaire et volve gris foncé.

Avec sa belle robe jaune vif, Dictyophora indusiata
Une espèce, également fréquente chez nous, liée aux déjections d'animaux : un panéole

Parfois, le ciel reste couvert presque toute la journée : alors, le rendement des deux panneaux solaires est quasi nul, insuffisant pour que je puisse mettre en route mon congélateur-frigo ; mais quand le soleil est généreux, le système fonctionne bien. Trois fois au cours de mon séjour, Gérard est passé m'apporter des bouteilles avec de l'eau congelée, qui m'ont permis de garder au frais mes provisions et mes boissons.

Cette fois, Véro et son mari Paul S. sont dans leur résidence secondaire (ils habitent en temps ordinaire au Kenya) : je bénéficie de leur autorisation de traverser leur propriété pour aller à la plage à mon endroit habituel. C'est l'occasion de tailler une petite "bavette", de donner et recevoir des nouvelles locales, de prendre un premier café. Ou de répondre, alors pendant le temps de midi, à leur invitation pour un repas typiquement malgache, en compagnie de Gérard et Raoul (et Santa), et parfois aussi du lémurien qui gîte à Hibiscus.

Vero et Paul (au centre), avec Raoul et Gérard

Parmi les quelques bouteilles de vin qu'on peut trouver à Mahambo, un "vin gris - Côte de Fianar" est le plus correct : on dirait un rosé, et il est d'un prix très abordable (3,5 €). Et puis, il y a les trésors que Gérard déniche à Tamatave. Un verre de bon vin donne évidemment du peps aux repas conviviaux, vous en conviendrez !

Assiette typiquement malgache

Le fameux bouillon avec des angivy, et les sauces

Vin gris des Côtes de Fianar
Peu farouche...

… le lémurien d'Hibiscus

A la maison, c'est un défilé permanent d'enfants et de jeunes, pour des médicaments ou des soins médicaux au dispensaire, ou une visite chez le dentiste de Fénérive. Les vedettes s'appellent Paracétamol, Amoxicilline, Medrol et Ibuprofen. On en trouve aussi, bien sûr, à la pharmacie locale. Pour tous mes visiteurs, il y a une tartine (c'est le Nutella amené de Belgique qu'ils préfèrent), du thé ou du coca ("bien glacé"), des bonbons et des vêtements. C'est la saison des avocats, dont je raffole, et des "litchis poilus", que je trouve beaucoup moins intéressants, parce que le noyau se détache difficilement de la chair, et que celle-ci est moins acidulée: il s'agit du ramboutan (Nephelium lappaceum), mais c'est un mot qu'ici on ne connaît pas ! Outre les bananes (toute l'année), on trouve à cette saison au marché: essentiellement des agrumes (mandarines, oranges et pamplemousses), des corossols - très mûrs, ils donnent un jus naturel excellent -, des zévis (sortes de pommes à chair jaune et ferme), quelques grenadelles (fruits de la passion, ici appelés "garanes") et papayes (chères !), et de rares ananas, gros et très savoureux. Quant au "fruit à pain", c'est plutôt un légume pour moi, même s'il pousse sur de gros arbres : avec sa chair, Vavrina fait de la purée ou de délicieux beignets. Pour la première fois, j'ai eu l'occasion d'acheter - ce ne fut pas simple, je vous épargne les péripéties qui m'ont forcé d'aller en scooter jusque Fénérive - un forfait pour internet; cela m'a permis de rester en contact, y compris visuel, avec Christiane restée en Belgique, grâce à Messenger, mais aussi à consulter ma boîte de mails, et pouvoir surfer, notamment télécharger mon journal belge pour avoir des nouvelles du pays. L'application "Messenger" est téléchargeable gratuitement sur le PlayStore - le faire avant de partir, avec le Wifi - indépendamment de Facebook : c'est bon à savoir, pour quelqu'un qui comme moi suis allergique aux réseaux sociaux et à leur "dictature". Il faut évidemment acheter une carte SIM malgache (prix très bas: 1.500 ar. = 20 cts d'euro) ; je conseille le forfait ORANGE "Be connect" = 7 jours pour 1 Go au prix de 12.500 ar., c'est-à-dire environ 3 euros. Le bonus de 2 Go offerts doit être utilisé entre 23h et 6h du matin : les insomniaques pourront en profiter !

Chaque jour, je vois arriver le Condor, bateau qui fait la navette Ste-Marie-Mahambo, essentiellement avec des passagers qui viennent en minibus de Tamatave. Le prix est nettement plus élevé pour les touristes (vazahas) que pour les indigènes. Le bateau est à l'ancre entre 8h et 10h du matin près du "Gîte" (Mahambo Beach), non loin de l'hôtel La Pirogue.

Pratiquement chaque jour pendant le temps de midi, je rencontre les élèves du campus Mitsinjo, pour une petite leçon de français. Cette année, je me suis servi des films projetés chez moi le soir : ils ont aimé "Ernest et Célestine", "Madagascar 1", "Raid Dingue", "La Reine des Neiges", "Harry Potter à l'école des sorciers", "Kung Fu Panda", "Les Rebelles de la Forêt", et même "Les trois petits cochons", vieux film de Walt Disney.

La lessive, une autre activité au campus Mitsinjo
Nicolas trie son riz, une autre activité typiquement malgache...

Aujourd'hui, Gérard est invité à la leçon de midi
... pendant que sa casserole bout déjà sur le feu

Autres activités avec les jeunes : un peu de natation le dimanche après-midi et la visite du CLEF (Centre Local d'Etudes Francophones), dans une pièce du bâtiment de la mairie. Il s'agit d'une petite bibliothèque d'ouvrages variés en langue française (de la BD aux livres scientifiques, en passant par des atlas, dictionnaires, albums et romans) : j'ai pu inscrire, auprès de la responsable, 8 élèves du campus ; la cotisation est dérisoire, mais rares sont les jeunes qui en profitent ; j'y ai quand même rencontré 4 élèves du lycée de Mahambo, particulièrement causants et délurés : voilà le bénéfice des livres !

Ils ne sont pas tristes lors de la leçon de midi

Le carnet de correspondance de Mirinda...
L'indispensable tableau pour la leçon de français

... indique les mois d'écolage payés
Le bulletin d'Anathalicia était plus beau à Noël !

J'ai eu l'occasion d'assister de nouveau à la distribution du riz, que je finance une semaine sur deux. Le gros sac de 50 kg est amené par Faly en moto puis... sur son dos, et distribué par Fara: 10 kapoks (mesure à partir d'une de boîte de lait concentré sucré, bien houppée) pour chacun dans son panier.

Faly apporte le sac de riz...
... que Fara distribue à chacun

Faly suggère de remplacer la pompe par un puits. C'est OK, car ses arguments sont appuyés par le témoignage des élèves : il y a du sable dans l'eau, les tuyaux rouillent, le joint en caoutchouc doit être remplacé très souvent - normal, avec une vingtaine d'utilisateurs, les 17 jeunes + les familles de la gardienne et de Norosoa.

La construction du puits est en route...
Faly a confectionné de nouveaux bancs ...

... et sera achevée après mon départ (photos Fara)
... pour une classe du CEG : les élèves apprécient !

C'est aussi à Faly que le CEG voisin doit une dizaine de nouveaux bancs pour une des classes, bancs financés par le groupe des Ardéchois qui lui ont fait installer des latrines un peu partout dans le village, ainsi qu'un lavoir inauguré près du marché (voir photos en 2018)

Depuis l'avènement du nouveau président Andry Rajoelina, il y a moins de contrôles sur la RN5 - ils servaient surtout à obtenir un petit billet "pour arrondir les fins de mois" des pandores locaux - et les habitants sont confiants dans les réformes à venir et les promesses... de réparer la route ! Espérons qu'ils ne seront pas déçus. Chaque jour, les discours des hommes et femmes politique (y compris la soeur du président Rajoelina) qui se présentent aux législatives du 27 mai, scandent le passage de voitures-radio, dont les hauts parleurs déversent de la musique et des slogans qui ont l'air de moins intéresser la population locale que la distribution de T-shirts ou le partage d'un verre de rhum ou d'un zébu ! De toute façon, pas besoin pour moi de mettre de la musique : celle de la gargote de Suzy, de l'autre côté de la route, me sert de toile de fond quand je suis sur la terrasse…

Restés au campus ce week-end, ils sont venus sur la terrasse de Olatra
Manuela et Clotilde, du lycée, sont passées dire bonjour

Le toit de la maison de Vavrina laissait passer l'eau à plusieurs endroits. On va le refaire : pendant 4 nuits (les hommes embauchés sont assez fantasques, car j'ai eu tort de leur donner une bonne avance), Arliny dormira dans la chambre d'amis de ma maison, mais Vavrina refuse de quitter son logis, craignant, dit-elle, les voleurs... pour ses assiettes et ses casseroles !

Réparation du toit de Vavrina ...
... qui n'a pas l'air rassurée !

Arliny, la fille de Vavrina, passe souvent avec ses devoirs pour de l'aide. Ce n'est pas si facile pour elle, ni pour moi d'ailleurs (!), des divisions du type 789 : 27... sans la calculatrice à laquelle nous sommes maintenant tous habitués grâce aux téléphones portables ! Il y a parfois aussi, surtout le week-end s'ils ne sont pas retournés dans leur famille, l'un ou l'autre élève du campus qui viennent "travailler" (lire ou colorier) sur une table de ma terrasse… La végétation de mon jardin, avec la pluie des deux premières semaines, est luxuriante à souhait.

Un arbuste à fleurs jaunes, du genre Senna (Fabacées)

Luxuriance du jardin de Olatra, depuis la terrasse

Autre fleur sans nom, près du portail d'entrée 

Seul petit souci de santé : un furoncle mal placé, que je soignerai, suivant en cela le conseil de la doctoresse du dispensaire, avec un antibiotique spécifique qui le fera, dit-elle, "fondre" progressivement. Il faudra quand même une 2ème boîte, mais elle avait raison. Surprise ! Un matin, quand je rentre de la plage : Juliette est là, venue de Sahamalany à pieds nus (8 km quand même ! Elle a quitté son hameau à 4h ce matin) pour me dire bonjour, en apportant quelques grenadelles : elle sait que j'en suis très friand. Manjato, le cadet de Fara et Faly, est là aussi, "juste pour dire bonjour", donc pas pour quémander quelque chose, comme cela arrive si souvent : ce sont des moments qui font chaud au coeur.

Juliette et Manjato, agréables visiteurs

Juliette et Vavrina sont de vieilles connaissances

Rencontrer des Malgaches est un de mes plaisirs favoris à Mahambo : en compagnie de Vavrina, je suis allé à la rencontre de ses "cousins", qui avaient habité chez elle en mai de l'année dernière, parce que la maman venait de mettre au monde une petite fille. C'est Vavrina qui avait amené la petite au dispensaire pour ses premiers vaccins (voir la photo en 2018). Pour un Malgache, la famille, c'est tout !

La cousine chérie de Vavrina

Yella est une autre cousine, qui habite sous le même toit

Quelques clins d'oeil encore avant de refermer ce compte rendu. Qu'apporter à Mahambo la prochaine fois ? Des lunettes de lecture pour des vieilles dames : à peine avais-je donné deux des 8 paires amenées que les clientes se précipitaient ; j'ai dû ramer pour en garder une paire pour Marcelline, à qui j'avais promis... Que diriez-vous d'un four solaire dans votre jardin ? Bien pratique pour chauffer une casserole d'eau installée en son centre concave (pour la vaisselle par exemple), comme je l'ai vu fonctionner dans la pelouse de Paul et Vero. Il ne faut cependant pas oublier de le tourner au fil du déplacement du soleil ; et puis, il faut du soleil ! A chaque séjour, je decouvre une fleur ou un fruit, nouveaux pour moi. Cette fois, c'est dans la haie contre la RN5 que j'ai découvert ce gros fruit, de la taille d'un citron vert allongé, avec à l'intérieur des sortes de noisettes irrégulières : les Malgaches lui donnent le nom de "pistache", mais cela ne ressemble guère à ce que nous aimons ici à l'apéritif ! Si vous tombez malade ou êtes blessé à Mahambo, et que la doctoresse est absente du dispensaire, Simonette, la sage-femme bien connue de tous, sera compétente pour vous soigner. Ici avec ma gardienne, elle m'a surpris quand elle s'est levée pour me donner quelques mandarines "pour le vazaha": agréable, non ? A mon arrivée au campus, le tableau noir portait une inscription de bienvenue, avec, sur une feuille de papier, le dessin de ma maison... où les élèves espéraient sans doute profiter du cinéma le soir ! Quand Gérard apporte une bonne bouteille de Bordeaux rouge, Paul, le mari anglais de Véro n'est pas le dernier à lever son verre ; il continuera sans doute après le Brexit, et c'est très bien comme cela...

Marcelline attendait impatiemment ses lunettes !

Four solaire chez Vero et Paul

La "pistache" pour les Malgaches
Vavrina chez Simonette, la sage-femme de Mahambo
Tableau d'accueil au campus Mitsinjo

A la santé des Européens ... et des autres !

J'aurais voulu vous montrer en photo, pour illustrer l’anecdote, le "personnage" capturé en fin de séjour, mais... il s'est échappé! Alors que nous visionnions justement "Ratatouille", j'ai enfin eu l'occasion, grâce à une cage en fer prêtée par Faly, d'attraper un rat - sans nul doute venu par le toit puis la fenêtre qui reste grande ouverte pendant la nuit, à cause de la chaleur - qui m'éveillait chaque nuit, en farfouillant dans les sachets en plastique qui sont sur la commode de ma chambre. Je l'avais exilé, en pleine nuit, dans mon living, car il se débattait comme un beau diable dans sa prison et ne m'aurait pas permis de me rendormir. Le matin, il avait pris la poudre d'escampette, après avoir rongé le fil de fer rouillé et donc vieilli du coin de la petite cage. Il ne s'est plus manifesté la nuit suivante : sage décision, car je l'aurais sans doute de nouveau coincé ! Reviendra-t-il hanter mes nuits en novembre ?

Quand j'ai écrit cette dernière phrase, j'ignorais que, quelques jours plus tard, on allait découvrir une grave maladie à mon épouse Christiane. Il m'est donc, pour le moment, impossible de faire des pronostics en ce qui concerne l'avenir, y compris pour ce qui est de mon retour à Mahambo.